19 Octobre 2012
Il est dit que l'on peut rire de tout si c'est bien fait... Je pense effectivement que l'on peut parler de tout avec humour si le talent est au rendez-vous. Je ne dis pas que c'est mon cas, je n'aurai pas cette outrecuidance (ahaan... un mot de plus de trois syllabes sur mon blog)(je vais faire une sieste, je suis claquée)...
Il m'est venu cette phrase hier soir. Jésus et moi sommes allés au ciné, histoire de se détendre le bulbe et, je suis restée comment dire... sur ma faim (pourtant j'avais mangé des Linguine, mes préférées)
Je vais reprendre depuis le début. Donc, nous voilà partis pour 1h20 sur le thème particulier du suicide et de tout ce qui va avec. Patrice Leconte (inspiré du livre de Jean Teulé) nous offre un film d'animation très particulier au titre évocateur : Le magasin des suicides. Et là tu te dis, "humm super, ils s'éclatent vraiment tous les deux"... et j'ai envie de te répondre "oui, merci et toi?". J'entends que ce soit particulier de se détendre devant ce thème mais rappelle-toi, je me détends aussi devant Confessions Intimes (et même en écoutant du Hard Rock^^).
Bref, nous chaussons nos plus belles lunettes 3D (parfaites pour exacerber ta libido) et c'est parti. Je ne voudrais pas tout dévoiler mais je vais le faire un peu quand même. Les graphismes sont différents des grandes productions américaines mais très réussis. Les couleurs, les tronches, le climat... tout reflète le glauque. Et là, je me dis "miam!".
Le synopsis m'attirait déjà beaucoup :
Imaginez une ville où les gens n’ont plus goût à rien, au point que la boutique la plus florissante est celle où on vend poisons et cordes pour se pendre. Mais la patronne vient d’accoucher d’un enfant qui est la joie de vivre incarnée. Au magasin des suicides, le ver est dans le fruit…
Franchement, Lecteur, ça donne pas envie?! Quand t'es fan de Tim Burton et de son univers, tu ne peux qu'avoir envie de sauter sur l'occasion de mater une production française qui s'en approcherait.
Le film commence. Le décor est planté. Ils osent l'humour noir, les plans décalés sur les suicidaires et les suicidés. Ca me plait! L'histoire avance (lentement, je dois dire). Certains détails me coupent un peu dans mon élan. Certaines vannes me font vraiment rire (les plus osées, les plus noires, les pires quoi!)... On attend le retournement de situation, le truc qui va nous défriser les poils pubiens (ou la moustache, pour toi, adepte de l'épilation intégrale). Il arrive. Finalement tu te retrouves avec une mini-vague plutôt qu'avec un lissage brésilien. Soit. Mais quand le générique de fin arrive, Jésus et moi, on s'est retrouvé... comment dire...circonspect? Dubitatif? Con!
Tu te lèves, tu regardes ton cher et tendre. Tu sais pas vraiment quoi dire. Quand, en plus, tu sais que l'entrée t'as coûté un bras (enfin un des siens)(ça va, il en a deux!)... T'es un peu emmerdée, avouons-le. Parce que t'es pas franchement convaincue mais en même temps... t'as pas détesté non plus. Bref, t'es mi-figue mi-raisin... Et Jésus ne mange pas de fruit.
Par contre, le débriefing qui a suivi était vraiment génial. Finalement, le film avait tout ce qu'il fallait pour être un OVNI renversant mais... Non! C'est pas grave, chemin faisant, nous voilà partis pour refaire le film, en appuyant là où c'était vraiment lugubre, en rajoutant du morbide, en imaginant ce qui n'a pas été développé... Et plus on imaginait le pire, plus on riait. Est-ce qu'on a été de parfaits cobayes? Est-ce l'effet que Leconte voulait donner à son film? J'avoue, on s'est posé la question à rire comme des belettes...
Le fait est que les promesses n'ont pas été réellement tenues. On voulait sûrement du trash, du qui secoue (de rire), du qui finit sur une grande leçon de vie... et ça n'a pas été le cas. On gardera par contre l'idée, les bons passages (entre autre, la danse orientale pour Jésus)(l'articulation dépressive du père pour Moi) et on jettera un mouchoir sur nos envies sinistres. Je te conseille quand même Lecteur, de voir ce film qui a fini par devenir un OVNI dans mon cerveau (de poupée mais quand même).
Enfin, mine de rien (mine de crayon), j'ai tout de même fini par me poser des questions sur ma santé mentale vu les sujets qui me font rire.
En même temps, je me dis que ma profession de poupée-infirmière m'a sûrement aidée à développer cette facette de ma personnalité. (ainsi que l'humour de ma loutre, je pense, mais la loutre est une infirmière aussi... CQFD). Il est vrai que l'on finit par rire de tout dans ce métier. Tout y passe, du sujet le plus léger (un pet) au plus lourd (un lit de mort ou un fauteuil roulant... tout dépend du cadavre qui se trouve dedans)(pardon, c'est plus fort que moi).
Alors, pour rester dans le sujet de "l'humour peut aborder tous les thèmes quand on a du talent", et aussi parce que j'aime terminer mes bafouilles en te faisant un cadeau (culturel...huhu), je laisse à tes mirettes le soin de découvrir ce texte de Bernard Dimey. (je remercie au passage mon Papoubis qui a ouvert la porte de mes neurones à cet artiste)
La crucifixion
Tu viens c't' après-midi à la crucifixion?
T'as qu'à v'nir avec moi, ça t'chang'ra les idées !
Ta bergère est pas là, profit'de l'occasion
Moi j'ai prév'nu Lévy que j 'prenais ma journée
J'y ai dit "j'veux voir ça, et pis j'ai mes raisons !"
Il a pas pu r'fuser vu qu'il y va, cézigue !
ça va ram 'ner du monde et marquer la saison
c' t'affair'là, tu vas voir, mais le truc qui m'intrigue
c'est qu'sur les trois clients qu'ils vont foutre au séchoir
Y en a deux, paraît-il, qu'on a dû bien connaître
Ils nous ont fait marron sur un coup d'marché noir
on ira les r'garder, ça les amus'ra p't'être
Quand on avait l'tuyau pour les surplus romains
j'avais tout préparé, tout mâché la besogne,
On était cinq su'l'coup, vraiment du cousu-main!
Quand ils nous ont doublé, on a passé la pogne
mais j'dois dire qu'aujourd'hui, je vais bien rigoler
Comm'quoî, mon vieux cochon, y a tout d'même un'justice
Comm'disait mon vieux père: "Faut pas tuer ni voler à moins
d'être certain que le coup réussisse !"
Le troisième, il paraît qu'il marche à la gamberge
Il jacte à droite à gauche, on l'a vu v'nir de loin
il est pas vieux du tout, il n'a pas trente-cinq berges
On n'sait pas bien qui c'est, c'est pas un gars du coin
C'est un genr'de r'bouteux, il guérit les malades
ça fait trois ans, guèr'plus, qu'il est sur le trimard
N'empêch'que le Pilate et ses p'tits camarades
l'ont prié d'obéir et d'arrêter son char
Comm'disait mon vieux père : "La poisse, elle vient tout'seule
mais plus tu veux jacter, plus qu'ell'vient rapid'ment
c'est un'bell'qualité d'savoir fermer sa gueule"
Mon père, pour un ivrogne, il n'manquait pas d'jug'ment !
D'ailleurs, en fait d'jug'ment, c'est par là qu'ça commence
Si tu veux v'nir, tu viens... Moi j'veux pas m foutr'en r'tard
Tu viens pas... Moi j'm'en vais... J'te dirai c'que j'en pense!
J'pass'rai pour l'apéro, à sept heures, au plus tard.
II
Ça y est, me v'la r'venu, j'en ai les jamb'coupées
J'ai vu assez d'salauds pour le restant d'mes jours
Et c'est l'genr'd'histoir' qui s'ra vite étouffée
T'en entendras causer, crois-moi, pis mêm'les sourds
D'abord le tribunal, une vraie rigolade!
Les carott' étaient cuites, archi-cuites au début
Le Pilate s'en foutait, mais les p'tits camarades
ça gueulait maximum, aussi fort qu'ils ont pu
Le mec, il était là, il a pas dit grand-chose
et pis j'étais trop loin ; j'ai pas bien entendu
tout l'mond'braillaît là-d'dans, mais pour plaider sa cause
y a personn'qu'à moufté... Ni l'avocat non plus...
D'ailleurs, y en n'avait pas! C'était la mascarade!
Et j'suis sûr que le gars il est blanc comm'l'agneau
Tu peux dir'que l'Pîlate et ses p'tits camarades
ça fait avec nous autres un'bell'band'de salauds
On a beau êtr'voyou, viv'comm'des malhonnêtes
y a tout d'mêm'des machins qui vous fout'le bourdon...
Tout était combiné, mêm'Ja croix qu'était prête
Et quand on vous y colle on sait qu'c'est pour de bon...
Et pis la croix maint'nant c'est toi qui t'la coltines
c'est nouveau, j'te préviens, si ça t'arrive un jour
Tout seul et ça su'l'dos jusqu'en haut d'la colline.
Il s'est juste arrêté pour faire un p'tit discours,
il s'trouvait juste en face d'un ramassis d'bonn'femmes
qui chialaient comm'des veaux, faut dir'qu'y avait d'quoi,
Il leur a dit comm'ça " pour le salut d'vos âmes
il vaudrait mieux pleurer sur vous-mêmes que sur moi! "
Sa vieille elle était là, la pauv'mémère, tout'seule
Y aurait pas eu un mec pour y donner la main,
surtout quand son fiston il s'est cassé la gueule!
Trois fois d'suite sous les coups d'ces enfoirés d'romains !
Moi, ça m'a foutu l'noir, pourtant j'suis pas sensible
ça m'a tout barbouillé, j'en suis cœur sur carreau!
Faut dir'que l'populo c'est vraiment des horribles
ils sont pour la plupart plus fumiers qu'les bourreaux...
Bref, je n'suis pas r'venu pour gâcher la soirée...
Ils l'ont cloué là-d'ssus et tout l'monde est parti...
Moi j'en suis lessivé, tu parles d'une journée...
Et tout l'monde est pareil... et pis c'est pas fini
Les deux autres ? Ah ben oui, pardonn'moi si j't'excuse
Hé ben j'les ai pas vus, j'y ai mêm'plus pensé !
Ils sont toujours là-haut, vas-y si ça t'amuse
Pour moi ça va comm'ça, j'en ai vu bien assez !
Paulo, tu m'connais bien, tu sais qu'les innocents
je m'en fous complèt'ment, seul'ment pour le quart d'heure
je dois dir'que c'que j'ai vu, ça m'a tourné les sangs
Un mot que j'dis jamais, Paulo..., ça m'a fait peur !
- Bernard Dimey -
Poupée, morte... de rire